L’étude du sabre – par où commencer ?

Un réel amateur du sabre d’art japonais n’a que deux possibilités pour acquérir des connaissances et former son œil : premièrement, l’appréciation de lames de qualité et, deuxièmement, une étude intensive de la littérature.

Michael HAGENBUSCH

Cet article est le remaniement d’un article publié en 2010 sur l’ancienne version de ce site. La modification de l’article d’origine a essentiellement consisté à expurger les livres en langue japonaise (que personne ne lit). Cette nouvelle liste se propose d’introduire les ouvrages les plus utiles à l’amateur de sabres japonais se lançant dans son étude. Les ouvrages présentés ci-après ont été sélectionnés d’après des goûts et des critères en partie personnels ; l’absence d’un ouvrage de cette liste ne doit pas automatiquement le condamner. Les livres sont classés en deux catégories :

1. les premières lectures destinées aux débutants ;

2. les ouvrages pour étoffer ses connaissances de base.

Enfin, il ne s’agit que de livres : il faut également voir des objets « en vrai ».

(les illustrations ci-dessous ne sont pas toutes à la même échelle)

1. Pour commencer…

Peu de livres ayant été écrits ou traduits en français, on ne pourra se dispenser de lire au moins en anglais. Néanmoins, une première approche au sabre en langue française est possible grâce aux ouvrages de Daniel Gony et Serge Degore, parus dans leur première édition à quelques mois d’intervalle (1988 et 1989). Ces deux ouvrages ont pour principal mérite d’avoir mis à disposition du public francophone des informations inédites en français, à une époque où internet ne permettait pas encore d’accéder à ces informations de la manière qu’on connaît. Le contenu de ces deux ouvrages est, de mémoire, sensiblement similaire : nomenclatures, fabrication d’une lame, les grandes écoles, déchiffrer les noms de forgerons, entretien des lames…

GONY Daniel, Introduction à l’étude du sabre traditionnel japonais, Chennevières-sur-Marne : Histoire et Documents, 1997, A4, 152 p.

DEGORE Serge, Nippon to : le sabre japonais, La Tour-du-Pin : Éd. du Portail, 2007, A4, 143 p.

Ces deux livres ont été merveilleusement complétés par celui de Yoshimura qui se détache de l’aspect technique et des tableaux de caractères chinois pour donner vie, à travers des anecdotes historiques, à cet objet souvent décrit trop froidement.

YOSHIMURA Ken’ichi, Les Japonais et le sabre, Typografica, 1998, 27,5 cm x 16,5 cm, 143 p.

Soit dit en passant, je déconseille de construire son savoir sur des articles publiés dans des magazines de coutellerie… Inutile de les citer ; tous se valent dans leur médiocrité lorsqu’il s’agit du sabre japonais.

Les anglophones bénéficient depuis plus longtemps d’ouvrages dans leur langue maternelle, écrits par des spécialistes japonais. Le premier livre « complet » est le Nippont-tô – The Japanese Sword par Inami Hakusui (1948), devenu quasi introuvable. Les collectionneurs plus âgés se souviennent également avec émotion du petit livre de Yumoto (The Samurai Sword – A Handbook, Tuttle Publishing, 1958) qui a été republié en 1991 chez le même éditeur avec une couverture rouge, et en 2008 avec une couverture jaune.

C’est chez Kodansha qu’on trouvera actuellement la plupart des livres « japonais » écrits en anglais, à commencer par The Japanese Sword de Kanzan Satô pour son approche historique et The Craft of the Japanese Sword du couple Kapp pour une description du processus de fabrication d’un sabre. Ces deux ouvrages importantissimes sont à lire dix fois et suffisent à eux seuls à acquérir les connaissances de base.

SATÔ Kanzan, The Japanese Sword, Kodansha International, 1983, 18,2 cm x 25,7 cm, 210 pages (la couverture présentée ci-contre est celle d’une édition plus récente).

KAPP Leon and Hiroko, YOSHIHARA Yoshindo, The Craft of the Japanese Sword, Kodansha International, 1987, 18,2 x 25,7, 167 pages.

Parmi les ouvrages publiés ces dernières années et qui intéresseront les débutants, on peut entre autres citer celui de Victor Harris, Cutting Edge, et de Clive Sinclaire, Samurai Swords.

HARRIS Victor, Cutting Edge – Japanese Swords in the British Museum, Tuttle Publishing, 2005, 22,2 x 28,4, 160 pages.

SINCLAIRE Clive, Samurai Swords – A Collector’s Guide to Japanese Swords, Chartwell Books, 2009, 23,3 x 31, 208 pages.

Les catalogues de collections ou d’expositions publiques ou privées sont une source d’informations à ne pas négliger. Abondamment illustrés d’œuvres représentatives, ils offrent par ailleurs des textes synthétiques qui prennent en compte les dernières découvertes. Parmi les catalogues d’importance les plus récents, il y a celui communément appelé « catalogue Solingen » qui fut publié à l’occasion d’une importante exposition de sabres au Klingenmuseum de Solingen entre le 18 mai et le 11 août 2002. Les 45 lames, qui ont toutes pour le moins le rang de jûyô tôken (« sabre important »), sont illustrées par une photo ou un oshigata et décrites soit en anglais, soit en allemand. L’exposition présentait également 6 koshirae ainsi que 21 tsuba Yagyû, toutes représentées en couleurs.

Nippon Bijutsu Token Hozon Kyokai, European Branch, Selected Fine Japanese Swords from European N.B.T.H.K. Collections, 333 p.

Art of the Samurai est le titre d’une importante exposition de l’art des guerriers qui s’est tenue au Metropolitan Museum de New York en 2009. Le catalogue de 344 pages représente et décrit les 214 lots que regroupait cet événement. On lira avec profit les textes d’introduction qui, dans l’ensemble, sont de qualité.

Les catalogues de ventes aux enchères ne sont pas à négliger, sauf les petits fascicules de Drouot qui ne valent pas grand-chose. Certaines « grandes ventes » ont donné lieu à un catalogue prestigieux des pièces offertes aux enchères, parfois réalisé très sérieusement. Citons par exemple un grand classique : la vente Compton chez Christie’s pour laquelle la maison de vente édita quatre catalogues, dont le fameux One Hundred Masterpieces.

2. Pour aller plus loin…

A partir d’ici, nous entrons dans le domaine des ouvrages qui ne sont pas recommandables à titre de première lecture. Ils risquent de rebuter d’emblée le lecteur (évitez donc de les offrir pour Noël à votre petit neveu qui se passionne pour les sabres de ninja). En français, il existe deux ouvrages de Serge Degore consacrés aux shintô et aux kotô, qui présentent les principales écoles de forge avec leurs caractéristiques. La description du travail des forgerons les plus importants est accompagnée d’oshigata du NBTHK.

DEGORE Serge, Les Sabres shintô, Editions du Portail, 1988, 266p.

DEGORE Serge, Les Sabres kotô, S. Degore Editions, 2009, 320p.

Et puisqu’on n’est jamais mieux servi que par soi-même, je recommande également les deux volumes de Sabres et Signatures, le premier pouvant même faire partie de la catégorie des livres à mettre en les mains des débutants.

Toujours en français, on lira également avec profit l’ouvrage de Laurent Milhau sur l’art du polissage des lames de sabre, le premier livre (au monde) consacré exclusivement à ce sujet et disponible auprès de l’Association Kokusai tôken kai.

MILHAU Laurent, Pierres et sabres – Stones and Swords, KTK, 84 pages, 1999. Texte en français et en anglais.

On trouvera enfin des dizaines d’articles spécialisés (dont des perles) sur les sabres et éléments de monture de sabre dans le Bulletin de l’Association franco-japonaise, un trimestriel qui fêtera sous peu son 140e numéro (www.afjbulletins.com).

Passons à présent aux ouvrages en anglais et destinés aux débutants confirmés (niveau B1 du cadre européen).

La maison d’édition incontournable en la matière est Kôdansha dont le catalogue comprend quelques excellents ouvrages, à commencer par le célèbre Connoisseur’s Book (version anglaise du Tôken kantei dokuhon, traduit par Mishina) qui est un très bon ouvrage de référence décrivant de manière synthétique les caractéristiques techniques de la quasi-totalité des « écoles » et groupes de forgerons.

NAGAYAMA Kôkan, The Connoisseur’s Book of Japanese Swords, Kôdansha Int., 1997, B5, 355 pages.

Sur le polissage, on trouvera un autre ouvrage du couple Kapp écrit en collaboration avec le forgeron Yoshihara et le polisseur Takaiwa.

TAKAIWA Setsuo, YOSHIHARA Yoshindo, KAPP Leon and Hiroko, The Art of Japanese Sword Polishing, Kôdansha Int., 2006, B5, 192 pages.

Ces dernières années ont paru plusieurs titres consacrés aux gendaitô (sabres forgés entre 1876 et 1945) et shinsakutô (sabres forgés après 1945) qui étaient un peu déprisés par les collectionneurs jusqu’alors. Publiés chez Kôdansha, on les achètera les yeux fermés.

TSUCHIKO Tamio, The New Generation of Japanese Swordsmiths, Kôdansha Int., 2002, B5, 255 pages.

KAPP Leon and Hiroko, YOSHIHARA Yoshindo, Modern Japanese Swords and Swordsmiths – From 1868 to the Present, Kôdansha Int., 2002, B5, 222 pages.

KISHIDA Tom, The Yasukuni Swords, Rare Weapons of Japan 1933-1945, Kôdansha Int., 2004, 19,7 x 26,7, 155 pages.

Last but not least, il faut signaler et recommander sans réserve les traductions de Markus Sesko qui mettent à disposition des collectionneurs occidentaux des informations tirées d’ouvrages japonais. Bonne lecture !

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